Dans des circonstances normales, près de 8 % du GNL et environ 2 millions de barils de pétrole passent chaque jour par le Canal de Suez. En outre, 10 % du commerce mondial est réalisé lors du passage par l’Égypte au moyen de cet axe stratégique, et les mouvements qui y sont générés représentent plus de 8,5 millions d’euros de marchandises.
Une seule journée sans activité pourrait avoir (et a eu) un effet dévastateur sur le trafic maritime et l’approvisionnement de marchandises, générant une nouvelle ère d’incertitude sur le marché quant à l’approvisionnement de pétrole et de gaz dans le monde.
Le goulot d’étranglement généré par l’Ever Given, un fait sans précédent
Le 23 mars 2021 s’est produit un événement sans précédent qui a menacé de bloquer l’un des accès parmi les plus fréquentés du monde, et qui a eu des conséquences sur les chaînes d’approvisionnement à l’échelle mondiale.
Le Canal de Suez, principale artère commerciale entre l’Europe et l’Asie, a été bloqué par l’Ever Given, l’un des plus grands porte-conteneurs du monde, provoquant un goulot d’étranglement dans l’un des points stratégiques du trafic maritime international et congestionnant la circulation de plus de 10 % de la logistique maritime mondiale.
Le porte-conteneurs a finalement été débloqué le 29 mars, comme nous le relations dans l’article où nous avons repris les informations officielles de la télévision publique et diffusées par CNN.
Le résultat : ce même jour, 369 navires restèrent bloqués dans une retenue en tentant de passer par le canal, sur les côtés d’un obstacle qui a finalement pu être retiré, mais qui laisse de nombreux imprévus à résoudre, ainsi que d’immenses conséquences, afin de retrouver la normalité dans le Canal de Suez.
Les effets lors des premiers jours du blocage
Les premières heures après que le bateau se soit échoué ont été cruciales pour analyser la situation, surveiller chaque mouvement et mettre en place une stratégie permettant d’aborder les étapes suivantes.
À ce stade, et même à présent que le porte-conteneur a été dégagé, il est essentiel de conserver le contrôle sur l’ensemble des opérations associées à cet incident afin d’obtenir une traçabilité en temps réel permettant d’informer les chargeurs du transit de leurs marchandises.
Lors des premiers jours de blocage, du 23 au 28 mars, les conséquences étaient claires et l’incident a entraîné les situations suivantes :
- Retards importants des navires desservant l’Asie, le Moyen Orient et l’Europe
- Voyages à vide en Asie afin de remettre les horaires en place alors que les navires se trouvaient hors de position pour les retours
- Il a fallu davantage de temps pour remettre en place et retourner les conteneurs chargés, ce qui a aussi eu des conséquences sur les conteneurs vides.
- Les conteneurs dans lesquels se trouvaient des marchandises urgentes ou périssables ont été redirigés vers le transport aérien afin d’éviter que l’incident ne prenne davantage d’ampleur, ce qui a eu un impact sur les prix.
Impact sur l’industrie du gaz et du pétrole après le déblocage
Le Canal de Suez est traditionnellement considéré une voie essentielle pour le transport de gaz naturel liquéfié (GNL) et de pétrole, ce qui est confirmé par les chiffres donnés par la Lloyd’s List Intelligence : l’année dernière, environ 5 163 pétroliers sont passés par le canal et ont déplacé près de 2 millions de barils de pétrole par jour.
Par ailleurs, des sources officielles telles que l’EIA viennent confirmer que les flux de pétrole qui passent par cet axe représentent près de 10 % du total vendu dans le monde. Le GNL enregistre quant à lui 8 %.
En raison de son importance, l’impact de cet incident dans le secteur qui nous occupe, pétrole et gaz, n’est encore pas connu. Il est actuellement calculé par des analystes spécialisés et des économistes qui tentent de faire une prévision la plus précise possible afin d’accélérer la prise de décisions.
Indépendamment de tout cela, le poids de ce secteur à son passage dans le Canal de Suez est en lui-même une conséquence quant à l’approvisionnement. Cela aura forcément des conséquences sur les prix, en fonction des réserves disponibles.
Selon Osama Rabie, chef de l’Autorité du Canal de Suez (ACS), l’échouage de l’Ever Given a eu un fort impact sur le canal et un coût de « 14 à 15 millions de dollars USD par jour ». Il a en particulier souligné que « les prix du pétrole dans le monde ont immédiatement augmenté de plus de 6 % ».
L’impact sur les prix de cet incident peut-il vraiment être très important ? Selon les experts, le baril de Brent était tombé á 60 USD (-4 %) le 23 mars, avant de remonter après cet incident à 64,3 dollars. Cela pourrait indiquer que l’impact sur le pétrole serait significatif. Néanmoins, les réserves actuelles sont abondantes (conséquence directe de la crise du Covid) et l’impact de l’échouage du porte-conteneurs ne s’est pas traduit de façon substantielle sur la cotisation du pétrole.
D’autres chiffres viennent soutenir la théorie selon laquelle « cela aurait pu être pire ». En effet, les réserves générées lors de la crise sanitaire ont pu jouer le rôle d’amortisseur de cet incident, selon le conseiller Arthur D. Little Middle East, qui lance un message : « Si cet incident s’était produit à un moment où la demande de pétrole et de gaz était plus importante et où les volumes des réserves étaient moindres, avec une capacité de production disponible réduite, les prix se seraient envolés ». D’autres éventuelles conséquences auraient pu être elles aussi dévastatrices pour le marché.
Par ailleurs, deux facteurs jouent également un rôle important : les itinéraires et la saison. Tout le monde sait qu’au cours de ces dernières années, les gros volumes de pétrole et de gaz liquéfié du golfe Persique sont transportés directement en Inde ou en Chine. De même, la proximité de l’époque estivale a été favorable, car si l’étranglement s’est produit en hiver ou à la fin de l’automne, époque où la demande de gaz est plus élevée, cela aurait entraîné de graves conséquences.
En définitive, bien que la plupart des analystes soient optimistes vis-à-vis de la situation, sans oublier la gravité de l’affaire, nous devons encore attendre les conséquences réelles du blocage de l’Ever Given, événement, comme nous l’avons dit, sans précédent.
